jeudi 4 septembre 2014

Bhirett Alouane

C’est la petite mer qui entre comme une langue pulpeuse et chercheuse dans le flan de la terre de la presqu’Île de Zarzis, pour lécher les sels de Sebkhet el Maleh, quand le barrage impitoyable de la route vers Bengardane, le permet. Aussi riche en poissons que le Lac d’El Bibane, cet endroit a été surexploité malgré le courant d’eau qui en renouvelle la biodiversité en plus des apports périodiques des alluvions riches en limon. Comme pour les contours de la Sebkha qui ont abrité une dizaine d’installations préhistoriques, Alouane a en plus intéressé les Puniques, les Romains et les contemporains…qui ont laissé des vestiges à Lemsa, Mrissa, Ouday Dhaou, Alouane Nord, Alouane Sud, Bogra… Par les constats de surface et paradoxalement à travers les restes des quelques fouilles sauvages, on peut affirmer que quelques stations historiques sont restées paléolithiques, pendant que les autres ont fait un parcours d’accompagnement des passages Puniques, Romains et Islamiques. Comme j’ai toujours fait en sorte, de vérifier l’ampleur des dégâts, sur les sites et en faire le balayage de surface, j’ai visité Dimanche dernier le site de Mrissa, sur la pointe Nord Ouest de l‘isthme nord juste en face de Lemsa située de l’autre coté de la petite mer. J’ai commencé d’assez loin à l’ouest, à partir du terrain de Chlindi, où j’ai constaté autrefois les restes d’anses grecques en forme de M autours du goulot. Malgré les travaux de construction d’une citerne pour les eaux de pluie et une petite crique pour petits bateaux, qu’il avait effectués, je n’avais rien trouvé. Sur le site proprement, cette fois, les dégâts sont énormes, mais en vérité, ils n’étaient pas initiaux, car c’était un déplacement massif de gravats et de pierres taillées pour défricher le terrain et les destructions étaient effectués depuis une vingtaine d’années, avec des fouilles de prospection çà et là à travers les années. Vue son emplacement, le site aurait servi pour la pêche, la surveillance, le signalement par le feu, les échanges, la fabrication de poterie et des carreaux énormes et très lourds en argile rouge. Avec de grosses briques noires en pierre volcanique, des constructions souterraines transformées en « citernes », de la menue monnaie, des clous en bronze, quelques silex, des foyers géants pour les feux de signalement, une quantité moyenne de tessons de poterie,…Mrissa aurait servi comme un poste important dans le parcours costal Grinn, Gyktis, Meninx, Zitha, Gergis, Bouteffaha…et le fort de Sidi Chaouech, Mdeyna et Sabrata au sud. Bien sur, malgré la chaleur, les difficultés du terrain, les sueurs acides dans les yeux, Boughmiga, prospecta l’endroit de long en large, zigzagant, tournant autour de lui-même, dans un quadrillage exhaustif du lieu, avec très peu de résultat à cause de la violence de la déformation du terrain. Mais puisque Boughmiga, était habitué à dégoter des objets importants sur des terrains vagues et dans nulle part, il sera bien capable d’en trouver sur un site répertorié. En effet, la pièce était là, affalée sur le coté dans un sillon léger au milieu d’un labour impitoyable et le cœur de Boughmiga s’emplit de joie et de curiosité avant de prendre le gros silex et en évaluer les dimensions et les attouchements….et c’était un vrai chef d’œuvre en la matière, une sorte de lame affutée, à l’allure à la fois artistique, pratique et dissuasive. Avec les autres pièces que j’avais trouvées aux alentours immédiats, on peut dire que le passage de l’homme du paléolithique supérieur est effectivement passé par cette région. Entretemps, malgré la beauté de l’endroit, la chaleur torride, l’appel de l’eau fraiche pour une éventuelle baignade légitime, Boughmiga, craignant les écarts de température et d’émotions, se limita à la joie de la trouvaille du gros silex taillé et la poignée de main, le shake hand, virtuel avec ses ancêtres. Lihidheb mohsen Zarzis 04.09.2014